Le monde juridique a été secoué jeudi par le décès d’un avocat connu internationalement, Jacques Vergès. Connu surtout pour avoir défendu des dictateurs et des criminels de guerre, il est aussi connu au Québec pour être l’avocat qui a renvoyé de chez lui l’animateur Richard Martineau qui l’interviewait pour l’émission Les Francs Tireurs.
Me Vergès faisait preuve d’humanisme, beaucoup même, y compris envers les gens accusés de crimes contre l’humanité. Ça lui aura évidemment valu plusieurs critiques. Néanmoins, sa philosophie très intéressante vaut la peine d’être étudiée et peut se résumer ainsi:
- Tout le monde a droit à une défense.
- L’avocat ne défend pas le crime mais la personne qu’on accuse, à tort ou à raison, de l’avoir commis.
- Le criminel n’est pas et ne doit pas être traité comme un animal. Ce dernier ne fait que suivre son instinct alors que les règles entre pairs (et leur violation) sont une invention humaine. Il donne l’exemple des abeilles, expliquant que jamais elles ne renverseraient leur reine pour instaurer une république.
- Le criminel est un être humain comme nous, qui a vécu un moment de faiblesse, de colère, de folie, etc, qui l’a poussé à commettre le geste reproché. On a parfois peur d’accepter de voir le criminel ainsi car on a peur de l’idée que ça aurait pu être nous. Mais le juriste insiste, si on refuse d’accepter ce fait, on ne peut pas comprendre les motivations profondes qui mènent aux différents crimes et on s’empêche de combattre la criminalité.
- L’analyse humaniste du crime est essentielle car on ne sait pas comment on considérera demain ce qu’on juge criminel aujourd’hui. Il donne l’exemple de Jeanne d’Arc, brûlée au bucher en mai 1431 et par la suite canonisée, ou encore de l’homosexualité.
Les médias de masse ont dressé de bons portraits du controversé juriste suite à son décès, inutile d’en ajouter un ici qui n’apporterait rien de nouveau. Je crois toutefois pertinent de vous présenter deux extraits vidéos qui vous permettront de comprendre mieux ce qui soutient son humanisme et sa vision de la défense. Il a aussi publié chez Du Rocher en 2008 le livre Journal: La passion de défendre, qui est sans doute disponible à la bibliothèque.
Tout d’abord, voici une conférence que Me Vergès a donné devant un parterre d’étudiants et d’étudiantes de l’Université de Neuchâtel, en Suisse, en 2009. Il est en quatre partie qui devraient s’enchaîner automatiquement.
Et, ensuite, un grand moment de télévision, l’entrevue où Me Vergès a renvoyé de chez lui Richard Martineau.
Je termine en ajoutant un lien vers un troisième vidéo, que je n’ai pas encore regardé mais que mon confrère blogueur Dominique Noël recommande sur Twitter. Il s’agit de la plaidoirie de Me Vergès alors qu’il défendait Klaus Barbie, qui fut chef de la Gestapo allemande à Lyon durant l’occupation nazie en France.