Un photographe que je connais se trouve dans une situation malheureusement courante: une de ses photos est utilise librement par un journal, qui l’a reçu par courtoisie d’une organisation qui n’avait pas le droit de la partager.
PhilĂ©mon Beaulieu a photographiĂ©, Ă son compte, une manifestation survenue Ă MontrĂ©al en mars dernier. Parmi ses photos figurait une, trĂšs rĂ©ussie, du prĂ©sident de la FĂ©dĂ©ration Ă©tudiante collĂ©giale du QuĂ©bec (FECQ), LĂ©o Bureau-Blouin. Ce dernier a publiĂ©, par la suite, une lettre d’opinion dans le journal La Presse et a fournie la dite photo au journal montrĂ©alais Ă titre de courtoisie. La Presse l’avait alors recadrĂ©e de façon Ă supprimer le nom de PhilĂ©mon de la photo. Ce dernier n’en avait pas fait de cas Ă l’Ă©poque, puisque ça rendait service Ă la FECQ, mais il rĂ©alise maintenant que La Presse rĂ©utilise la photo librement en la qualifiant de photo d’archives.
Je traiterai Ă nouveau de cette histoire pour aborder le cĂŽtĂ© lĂ©gal (ou illĂ©gal) de cette utilisation par La Presse. Ce que je souhaite aborder prĂ©sentement est ce qu’il faut faire pour Ă©viter que ça n’arrive.
Il est normal d’Ă©prouver de la solidaritĂ© avec certaines organisations, spĂ©cialement dans les diffĂ©rents domaines politiques, et de vouloir contribuer Ă leurs efforts en leur accordant d’utiliser une ou plusieurs de nos photos. PhilĂ©mon l’a fait, je le fais aussi, et sans doute que plusieurs d’entre vous qui lirez ce texte le faites. Mais quand on le fait, il faut garder en tĂȘte un point important: en terme de respect de droit d’auteur, les gens sont insoucieux et ignorants, et le fait qu’ils soient Ă la tĂȘte d’une grosse organisation n’y change rien.
En la matiĂšre, il faut prendre tout le monde par la main. Balisez. Encore et encore.
Je vous suggĂšre la lecture d’un billet de Francis Vachon, photographe de presse basĂ© Ă QuĂ©bec, sur la rĂ©daction d’une licence. En gros, indiquez clairement ce que l’organisation a le droit de faire avec la photo. Indiquez sur quel type de document, voire sur quel document, la photo peut figurer. Indiquez pour combien de temps. SpĂ©cifiez que la licence n’est pas transfĂ©rable, formulez cette clause de façon Ă ce que mĂȘme un idiot la comprenne au besoin. Bref, faites comprendre Ă l’organisation bĂ©nĂ©ficiaire de votre gĂ©nĂ©rositĂ© que votre contribution n’est pas infinie et que vos conditions doivent ĂȘtre respectĂ©es.
Suggestion personnelle, faites aussi une facture. Non pas avec un tarif de 0$, mais avec votre vrai prix, assorti d’un rabais du mĂȘme montant. L’idĂ©e derriĂšre ça est de travailler Ă ce que les gens prennent conscience de la valeur d’une photo. Avec la dĂ©matĂ©rialisation liĂ©e Ă l’informatique, les gens en viennent Ă penser qu’une photo, c’est juste un fichier JPG qui n’a rien coĂ»tĂ© Ă sortir de l’appareil-photo. Alors que la rĂ©alitĂ© est toute autre. Faites comprendre que votre travail a une valeur, que le cadeau que vous faites a une valeur, et que de recevoir un tel cadeau est un privilĂšge. Pas un droit.
L’idĂ©e n’est pas de chercher Ă poursuivre l’organisation. Enfin, vous pouvez peut-ĂȘtre, mais personnellement je n’en vois pas la pertinence. L’idĂ©e est plutĂŽt de s’assurer que vos conditions soient claires pour tout le monde. L’idĂ©e est d’empĂȘcher qui que ce soit de prĂ©tendre l’ignorance ou de prĂ©tendre avoir prĂ©sumĂ© une plus grande gĂ©nĂ©rositĂ© de votre part.
L’idĂ©e est de conserver le rĂŽle du gentil lorsque vous dĂ©ciderez que l’organisation ne recevra plus de cadeau.
Chapitre 2: en une telle situation, le journal peut-il se dĂ©fendre d’un poursuite en rejetant le blĂąme sur l’organisation? On garde ça pour un prochain billet! đ
Tes billets sur ce qui entoure l’exercice de la photographie sont toujours aussi pertinents. En tant que nĂ©ophyte, cela me permet d’en apprendre plus sur l’exercice intelligent et professionnel de cet art.
Merci Vincent! đ